• Née dans les prison de Newgate d'une mère condamnée à mort mais sauvée par un gardien qu'elle a séduit, la petite Moll est tour à tour volée par des Bohémiens, recueillie par l'assistance publique, puis placée en apprentissage chez une couturière. Belle et intelligente, elle attire l'attention d'une riche famille qui l'invite sous son toit. Les deux fils de la famille se la disputent : devenue la maîtresse de l'un, elle épouse l'autre. Une fois veuve, elle épouse un riche négociant qui l'abandonne pour échapper à ses créanciers. Faisant croire qu'elle est riche, elle convole alors avec un troisième mari qui l’emmène en Virginie. Là, elle découvre que sa belle-mère est en réalité sa propre mère et son mari son propre frère. Elle rentre en Angleterre, épouse un quatrième homme qui se révèle être un aventurier qui l'abandonne finalement pour se faire bandit de grand chemin. Seul son dernier mari est un brave homme, mais il meurt peu après leur mariage.

    Réduite à la misère, elle devient voleuse : arrêtée puis déportée en Virginie, elle retrouve là-bas l'un de ses fils et mène enfin une vie paisible. Repentie et rentrant en Angleterre à soixante-dix ans, elle décide de raconter ses souvenirs.

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    Renouant ici avec la forme littéraire déjà employée dans Robinson Crusoé, Defoe mystifie le lecteur en lui présentant des mémoires qu'il déclare authentique. Cette méthode qui lui permet de parler à la première personne tend encore à renforcer la verve extraordinaire de l'auteur.

     Cette verve est mise au service d'une peinture réaliste de la société anglaise : de la difficulté d'être une femme et de ne trouver de solution que dans le mariage ou la prostitution, de la difficulté d'être pauvre et de risquer à tout moment la loi du plus fort ou la prison. 

    L'argent, celui qu'elle possède ou celui dont elle manque, est le véritable protagoniste du roman ; c'est lui qui détermine les sentiments de Moll, lui qui inspire à la narratrice ce sens aigu des détails...

    Moll Flanders, tout autant que Robinson Crusoé, mérite de figurer parmi les grands classique de la solitude, à côté de Don Quichotte, de l'Idiot. 

     


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    La Fortune des Rougon met en place le décor, la petite ville de Plassans, la chute de la République et l’avènement du second Empire, et les personnages qui vont animer le cycle des Rougon-Macquart.

    Les Rougon et les Macquart : deux familles ennemies dans la France des années 1580 qui vit l'écrasement de la République et l'avènement du Second Empire. Ainsi commence La Fortune des Rougon et, en même temps, le cycl des Rougon-Macquart. Dans le premier tome, le docteur Pascal fait des apparitions épisodiques ; il sera aussi le personnage du dernier livre ; il est un Rougon, mais il est aussi le regard de Zola, l'observateur, à la fois médecin et savant, le témoin qui entrevoit " l'avenir des Rougon-Macquart " comme une meute d'appétit lâchés et assouvis, dans un flamboiement d'or t de sang. Dès les premières pages du roman, le ton est donné, oscillant entre la grandeur épique et les intrigues de bas étages, entre les défenseurs de la République et l'union sacrée des légitimistes et autres alliés dont l'objectif est la quête du pouvoir et des richesses.

     C'est dans une petite ville de province, Plassans, que Zola, en naturaliste, étudie les conséquences du coup d'Etat de 1851. Au coeur de l'intrigue, les deux familles, Rougon et Macquart, et entre les deux, à l'origine, Adélaïde Fouque, qui a épousé un Rougon, jardinir, mais qui a eu pour amant un Macquart, contrebandier et ivrogne. Il y a donc des enfants légitimes et des bâtards : le Rougon-Macquart, Pierre Rougon, un légitime a trois fils : Aristide, Eugène et le futur docteur Pascal. Côté Macquart, il y a Lisa, Gervaise et Jean. Les Rougon sont bonapartistes, sauf Pascal, indifférent à la politique. Les Macquart, eux, sont républicains, moins par idéal que par haine des Rougon. Pierre Rougon, pour accéder au pouvoir à Plassans et se faire le champion de l'ordre, fomente un faux complot républicain à la tête duquel, moyennement finance, il place son demi-frère Macquart. Machinerie sordide et avidité : le parti de l'ordre triomphe et, avec lui, les trois piliers de la société du Second Empire : famille, religion, propriété.
    Zola, lui est résolument républicain, comme le docteur Pascal, qui finit par se rallier aux conjurés...

    Dans la préface de La Fortune des Rougon, Henri Guillemin écrit...

    " Un automatisme s'est établi, depuis trois quart de siècle à peu près, dans la critique officielle : Zola écrit mal ; Zola n'écrit pas ; un maçon musclé, pas un artiste..." On ne lit pas " disait Zola, vers la fin de sa vie. Et ce mot semblait une boutade, paradoxale, chez cet écrivain si jalousé de ses confrères pour l'énormité de ses tirages. C'était vrai. Lire ne veut pas dire dévorer, chercher le choc, courir aux morceaux de bravoure, aux pages culminantes, à ces violences de vérité pour lesquelles la foule se ruait sur Nana ou Germinal ou la Bête humaine. Lire veut dire avancer dans un écrit patiemment, ligne à ligne. Que de trouvailles on fait alors dans cette oeuvre immense de Zola où rien n'est bâclé..." 

       

     

     

     

     

     

     


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  • Le saviez-vous ? La cote de popularité du puzzle a un jour égalé celle du football dans le coeur des américains. C'était avant que, dans les années 90, une série de meurtres n'assombrisse le monde du jeu professionnel de puzzle. S'adonnant à son loisir préféré, un sérial killer supprime un à un les acteurs principaux de la compétition et de la grande société de puzzologie. Les victimes ayant subit un injection massive de penthotal, sont retrouvées amputées d'un de leu membres. A la place : une photo polaroïde figurant " la pièce manquante "...

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  • Marcel Aymé

    Avec Louis-Ferdinand Céline et Paul Morand, Marcel Aymé demeure sans doute le plus grand écrivain que la littérature française ait connu depuis la mort de Marcel Proust. Observateur féroce et méticuleux des mœurs française contemporaines, prodigieux créateur de personnages, conteur incomparable et malicieux, il a porté sur l'être humain un regard dont la profondeur et l'acuité évoquent les grands moralistes européens du XVIIe siècle, mais sans cette sécheresse glaciale et ce cynisme un peu effrayant qui caractérisent l'oeuvre d'un La Rochefoucauld ou d'un Balthasar Graciàn y Morales. C'est que, chez Marcel Aymé, la férocité était toujours associée à une secrète tendresse : il prenait les hommes comme ils étaient, c'est-à-dire ni bons, ni méchants, et leurs petitesses lui inspiraient un franc scepticisme, mêlé d'une très discrète commisération. 

       Né en 1902 à Joingny, Marcel Aymé a passé a plus grande partie de son enfance en Franche-Comté, aux abords d'une forêt peuplée de légendes et de mystère, qui lui inspirera, beaucoup plus tard, un étonnant roman fantastique et forestier, "La Vouivre". Comme l'a écrit Bernard Clavel : " Il nous entraîne en un fabuleux univers où le réel côtoie l'imaginaire le plus débridé, où le rêve s'endort dans la brume de forêts dont nous ne savons plus si elle appartient à notre monde d'adultes raisonnables ou à la part la plus merveilleuse de notre enfance. "

    Marcel Aymé

    C'est toutefois à Paris, où il vivra jusqu'à sa mort, survenue en 1967, que Marcel Aymé va trouver l'inspiration qui fera de lui celui que Pierre Gripari n'a pas hésité à appeler " l'écrivain du siècle". De son perchoir montmartrois, il a en effet passé sa vie à observer les arcanes de la sottise et de l’imbécillité, n’épargnant personne et faisant montre d'une indépendance d'esprit et de langage en tout point exemplaire, ainsi qu'en témoigne l'admirable et diabolique petit pamphlet qu'il devait, au lendemain de la dernière guerre, déposer sardoniquement au pied de l'intelligentsia régnante, " Le Confort intellectuel". Mais c'est évidemment dans ses romans et dans ses contes que Marcel Aymé va donner toute la mesure de son talent littéraire et de son génie à saisir les fondements psychologiques et moreaux de la petite bourgeoisie française. 

           C'est dans cette perceptive que se développe la veine proprement fantastique de Marcel Aymé, dont les nouvelles réunies dans " Le Passe-Muraille" constitue l'éblouissante apothéose. 

    Marcel Aymé

    Les personnages de Marcel Aymé sont généralement de petites gens imbus de leur respectabilité, sans imagination et terriblement conformistes, souvent blanchis dans les labyrinthes obscurs de la fonction publique. Ils sont généralement bons époux et bons pères de famille, et portent sans la plus petite espèce de fantaisie l'uniforme de la IIIe République, à savoir le veston noir et le col amidonné. Vertueux, économes et amis de l'ordre établi, ils discours volontiers dans leur salle à manger Henri II, qu'envahit l'odeur bien française de la soupe au choux ou du pot-au-feu. Et pourtant, ces personnages très ordinaires recèlent en eux de forts étranges fantasmes, tels que le docteur Sigmund Freud lui-même n'aurait pu les soupçonner. Ce sont ces fantasmes que l'imagination fertile de Marcel Aymé projette dans ces nouvelles fantastiques, sans s'écarter pour autant de la plus stricte vraisemblance et de la plus exacte réalité.

    Un savoureux exemple nous en est donné par la nouvelle intitulée " Les Sabines ". C'est l'histoire d'une brave et jeune femme du 18e arrondissement qui répond au prénom de Sabine et dont le mari, qui l'appelle affectueusement et poétiquement " Binette", est sous-chef du contentieux dans une importante société. Douée d'ubiquité, Sabine va peu à peu se multiplier et réaliser tous les désirs que lui a inspirés la lecture des magazines de Cinéma :

    " Bientôt, la malheureuse ubiquiste fut saisie d'une frénésie de luxure et eut des amants sur tous les points du globe. Le nombre en augmentait au rythme d'une progression géométrique dont la raison était 2,7. Cette phalange dispersée comprenait des hommes de toutes sortes, des marins, des planteurs, des pirates chinois, des officiers, des cow-boys, un champion d'échec, des athlètes scandinaves, des pêcheurs de perles, un commissaire du peuple, des lycéens, des toucheurs de bœufs, un matador, un garçon boucher, quatorze cinéastes, un raccommodeur de porcelaine, soixante-sept médecins, des marquis, quatre princes russes, deux employés de chemin de fer, un professeur de géométrie, un bourrelier, onze avocats, et il faut bien en passer. Signalons pourtant un nombre de l'Académie française en tournée de conférences dans les Balkans, avec toute sa barbe. "

    Marcel Aymé

    Personne n'avait dépeint avec autant de précision et d'humour les pauvres chimères et les aliénations d'une petite bourgeoisie française nourrie de cinéma et de roman à quatre sous. C'est que la réalité est pavée de stéréotypes et de clichés qui seraient d'une noirceur désespérante si Marcel Aymé n'en tirait un parti véritablement désopilant. Le conformisme et la bêtise ne forment d'ailleurs pas seulement la trame de ses nouvelles fantastiques, mais encore celle de ses romans satiriques, au premier rang desquels figures Travelingue, Le Chemin des écoliers et surtout le sublime Uranus, chronique d'une petite ville française à la Libération.

    Marcel Aymé

    Le fantastique n'était-il toutefois, pour Marcel Aymé, que le meilleur moyen d'accéder à la réalité et d'exprimer une vision de monde au pessimisme radical ? C'est oublier l'inspiration médiévale et légendaire qu'il tenait de son enfance franc-comtoise, et dont la Vouivre est l'illustration parfois terrifiante. C'est oublier, enfin, la merveilleuse série des Contes du chat perché et les aventures de leurs deux charmante héroïnes, Delphine et Marinette, qui entraînent le lecteur dans un univers féerique où tous les animaux de la création s'adonnent à une irrésistible parodie de la condition humaine, comme dans le Roman de Renart.      

     

     

     

     

     

     

     

     


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    Une jonque qui transporte une troupe de comédiens accoste un jour dans l’île où vivent nos amis Jeanne, son frère Thomas, M. Henri… Le soir-même, ils jouent "Roméo et Juliette", faisant rêver d’amour tous les habitants de l’île. Le lendemain, stupeur ! la jonque est partie. Elle a emporté avec elle les accents et les épices. L’île découvre alors comme la vie est morne sans eux. Comment avaler, jour après jour, du riz sans safran ? Comment s’émouvoir ou s’émerveiller s’il n’y a plus d’accent aigu sur le e ? Jeanne décide de partir à leur recherche, d’autant plus que son frère s’est embarqué avec la troupe pour travailler comme souffleur. Son périple va la mener jusqu’en Inde, dans une vallée magique où se réunissent chaque année des comédiens du monde entier pour un festival secret de théâtre et d’épices. Ne viendraient-ils pas là pour se faire épicer ?

    Mais les accents se sont installés plus haut, sur les contreforts de l’Himalaya. Elle a retrouvé Thomas, qui mènera l’expédition jusqu’à la villégiature des accents, où se rassemblent régulièrement tous les accents du monde. Sur ces hauteurs, Jeanne va commencer à découvrir ce que c’est qu’aimer : accentuer sa vie.

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    Après " La Grammaire est une chanson douce " et "Les Chevaliers du subjonctif ", Erik Orsenna poursuit sa croisade linguistique avec " La Révolte des accents ".

    Selon la genèse, telle qu’elle nous est ici contée, la première ébauche du monde était d’un fade à faire sombrer l’humanité dans la déprime. Revisitant son œuvre, Dieu aurait pris conscience de ce défaut originel et entrepris de donner du goût à sa création. C’est ainsi qu’il créa un jardin des épices, une source de saveurs qui ne cessa de dispenser le précieux condiment de tout commerce humain : le sel de la vie. Aujourd’hui encore, au moindre manque de ce vital adjuvant, le goût de vivre se fait porter pâle. De même en est-il pour les accents. On ne peut les négliger sans attenter à la saveur des phrases.

    On s'évade dans ce pays imaginaire, par mésaventure, on réalise combien la vie a besoin de saveur, d'accentuation ! C'est un conte où l'amour entre les accents est possible. Où les chats sont les gardiens de la mémoire de leurs maîtres. Où tout est lumière et où l'auteur nous offre une explosion de couleurs, de senteurs et de saveurs à chaque page.

    Extrait : 

    " Depuis quelques temps, les accents grognaient. Ils se sentaient mal aimes, dedaignes, meprises. A l’ecole, les enfants ne les utilisaient presque plus. Les professeurs ne comptaient plus de fautes quand, dans les copies, ils etaient oublies. Chaque fois que j’en croisais un dans la rue, un aigu, un grave, un circonflexe, il me menaçait. 

    " - Notre patience à des limites, Don Luis. Un jour, nous ferons la greve. Attention, Don Luis, notre nature n’est pas si douce qu’il y parait. Nous pouvons causer de grands desordres.

    " Je ne les prenais pas au serieux. Je me moquais :

    " - Une greve, allons donc ! Et qui ça derangerait, une greve des accents ?

    " Je sentais bien monter leur colere. Je ne croyais pas qu’ils preparaient quelque chose.

    " J'en suis certain, quand j’y pense, c’est l’affaire des ordinateurs qui a tout declenche.


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