• Brillat-Savarin - La Physiologie du goût

    La Physiologie du goût ou Méditation de gastronomie transcendante, ouvrage théorique, historique et à l'ordre du jour, dédié aux gastronomes parisiens par un professeurs, membres de plusieurs sociétés littéraires et savantes de Brillat-Savarin invite le lecteur à suivre un parcours tant physiologique, philosophique qu’anecdotique sur le goût, même si, par endroits, ses théories paraissent, au regard des connaissances scientifiques acquises dans ce domaine, quelque peu obsolètes, voire fantaisistes. Mais le caractère piquant et enlevés des considérations "gustuelles" qui s'attachent à développer des notions aussi instructives que variées sur le sens, le goût, la gastronomie, la gourmandise, les plaisirs d la table, le repos, le sommeil, ou encore sur la diète, l'obésité ou l'histoire philosophique de la cuisine - pour ne citer que quelques thèmes des trente "méditations" qui constituent l'ouvrage - relève de manière attrayante la matière étudiée par Brillat-Savarin.

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    C'est un gourmet raffiné et expert que Brillat-Savarin aborde ce véritable traité de gastronomie. L'ouvrage a été rédigé sous l'égide de "Gastéréa", "dixième Muse" qui préside aux plaisirs du goût, et que l'auteur convoque au fil de son traité pour nous entretenir des mœurs nutritives de son temps, rejoignant en cela le témoignage ethnologique. Par ailleurs, l'auteur s'attache à nous donner une sorte de journal gastronomique, en intégrant une kyrielle d'anecdotes biographiques "de manière qu'il puisse en résulter de l'instruction sans fatigue", respectant par là même le précepte horacien : enseigner et distraire, Brillat-Savarin, en hédoniste affirmé, souligne l'importance du plaisir, notion maîtresse qui préside au goût et à la table. Toutefois, on ne saurait omettre la conversation qui sous-entend "l'esprit de convivialité" et représente, en dernière instance, le véritable point nodal de tout repas. il n'est pas de bonne chère sans agréable conversation. 

    Quoique sa stature presque colossale lui donnât en quelque sorte l'air du tambour-major de la Cour de Cassation, il était "grand homme" d'esprit... Depuis le XVIe siècle, en dehors de La Bruyère et de La Rochefoucauld, aucun prosateur n'a su donner à la langue française un tel relief.

     

     


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  • Valery Larbaud - Fermina Màrquez

    Dans un collège huppé de la banlieue parisienne, peuplé en majorité d'élèves étrangers, au début du siècle, de jeunes adolescents assistent à l'arrivée des deux sœurs de Màrquez, un nouveau. très vite, les plus hardis font leurs enquêtes auprès du jeune frère et apprennent le nom de l’aînée, qui les fascine, Fermina. Enfants d'un riche banquier colombien, les Màrquez sont venus à Paris accompagnés de leur tante, après la mort de leur mère. Santos Itturia, beau jeune homme très indépendant qui fait le mur du collège tous les soirs pour fréquenter les lieux de plaisir parisiens, est tout désigné pour faire sa cour à Fermina. Pourtant, un collégien soupire en secret : Joanny Léniot, le fort en thème. Dès lors, sa vie est bouleversée ; s'il excelle, c'est seulement pour plaire à Fermina. Il parvient enfin à devenir son ami et découvre sa grande piété sans réussir à la toucher avec son ambition et ses discours sur l'empire romain. L'aveu de son amour demeure sans réponse, car Fermina préfère Santos. Humilié, Léniot se met à la détester. Soudain, coup de théâtre, la voix du narrateur (Larbaud) se confond avec celle de Léniot pour ne faire qu'un. C'est un homme mûr qui revient sur les traces de son adolescence. 

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    Fermina Màrquez est à la fois un roman et une autobiographie qui se dénonce sur le tard. Tout au long du livre, la voix du narrateur semble extérieure, presque abstraite, décrivant non seulement les événements déterminants mais aussi les variations les plus subtils des sentiments de Léniot et de Fermina, la psychologie des deux personnages. Cela évoque un peu A la recherche du temps perdu de Marcel Proust. L rapprochement avec ce dernier est aussi pertinent pour expliquer les aspects autobiographiques du roman. C'est bien de cela qu'il s'agit et non pas de souvenir. Pourtant, on comprend que le narrateur doit être ramené au personnage de Lénior et, au-delà, à Valéry Larbaud lui-même.


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  • Virginia Woolf - Mrs Dalloway

    Clarissa Dalloway donne ce soir un bal dans sa maison de Westminster à Londres. Elle sort acheter des fleurs et, traversant St James Park, pense à son ami Peter Walsh qui est aux Indes et qu'elle aurait pu épouser étant jeune. elle rentre chez la fleuriste, s'attarde à contempler le spectacle de la rue : la foule heureuse sue les trottoirs, une mendiantes, ce jeune couple assis sur un banc : lui il est fou, il a des hallucinations, et sa femme Rezia, italienne, désespère de le guérir. Puis, Mrs Dalloway rentre chez elle où elle reçoit la visite inattendue de Peter Walsh, pendant que son époux Richard déjeune chez une amie. Sa fille Elisabeth par se promener avec sa préceptrice, alors que Rezia conduit son mari chez le célèbre docteur Bradshaw. La journée se passe en souvenirs, Peter dîne à son hôtel, et Rezia pleure son époux qui, rentré de chez le médecin a fini par se suicider. Mais la chaleur de juin rend la soirée heureuse, qu'achève la réception.

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     Virginia Woolf nous peint dans Mrs Dalloway l'émerveillement que lui procurent les mille sensations de la vie de chaque jours. C'est une fleur dans un vase, un avion qui passe, le soleil dans la rue... Mais si ce roman ne montre rien d'extraordinaire, c'est parce que Virginia Woolf s'attache à décrire la réalité avec la plus grande vérité possible. Or le monde dans lequel nous vivons est d'abord celui du quotidien, dont chaque moment comporte une profondeur et une richesse que l'habitude nous empêche de voir. Ainsi, au même instant, nous croisons tel passant, nous sentons le parfum de la rue, nous voyons courir les nuages, nous rappelons un souvenir, tout cela sans même nous en apercevoir. Virginia Woolf nous invite à puiser notre joie dans la banalité même, en prenant une juste conscience de chaque seconde vécue : ce miracle qu'il y ait quelque chose plutôt que rien. 

    Chacun des inconnus que, dans la rue, frôle Clarissa Dalloway nous est soudain révélé, tel qu'il est, et mystérieusement uni aux autres. Oui, d'une part, tout le passé contenu dans le présent et, d'autre part, tous les êtres humains de la grande ville, mystérieusement unis les uns aux autres par des émotions communes, tel est le sujet immense, presque sans limite, d'un roman qui, en apparence, n'est que l'histoire du jour où Clarissa donne un bal. 


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  • S'inspirant de l'Odyssée, Fénelon en développe le quatrième livre : accompagné du sage Mentor (qui n'est autre que Minerve), Télémaque est à la recherche de son père, Ulysse. La tempête le jette sur l'île de Calypso ; il fait à la déesse, laissée inconsolable par le départ d'Ulysse, le récit de ses aventures. Nous le voyons en Sicile, où il échappe à la mort, en Egypte, où il étudie la sage administration de Sésostris, à Tyr, où il admire la prospérité d'un peuple de commerçants puis échappe miraculeusement à la tyrannie du cruel Pygmalion. Victime de Vénus, il est pris d'une passion violente pour la nymphe Eucharis. Pour l'arracher à cette dangereuse ardeur, Mentor le précipite à la mer, et tous deux gagnent à la nage un vaisseau phénicien.

    Télémaque entend vanter le bonheurs des habitants de la Bétique, qui jouissent de la simple nature. Neptune les pousse alors dans le port de Salente : ils sont accueillis par le despote Idoménée. Autour de Salente, Télémaque fait son apprentissage militaire : il se distingue par ses exploits, mais il apprend à se montrer chevaleresque et à offrir des conditions de paix équitables. Au terme de ses voyages, il regagne l'île d'Ithaque, où il retrouve son père et épouse Antiope, la fille d'Idoménée.

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    Précurseur de Montesquieu, Fénelon combat l'absolutisme : le roi doit se soumettre aux lois et associer la nation tout entière à son autorité. Précurseur de Voltaire, il enseigne l'amour de la paix. Il insiste en chrétien sur la fraternité des hommes ; il parle souvent de l'injustice et des méfaits de la guerre : " La guerre épuise un Etat et le met toujours en danger de périr, lors même qu'on remporte les plus grandes victoires. " Il conseille même un arbitrage international pour éviter la guerre. Pour rendre les peuples heureux, sa grande idée est le développement de l'agriculture et l'abandon du luxe corrupteur, en faveur d'une vie saine et de mœurs rustiques, préfigurant en cela Jean-Jacques Rousseau.

    Auprès du groupe de Bossuet, Fénelon avait appris à condamner l'esprit de conquête, le luxe, la misère où étaient tenus les paysans et artisans, à rêver d'une cité où la vie fût simple et les intérêts privés subordonnés à l’intérêt général. Défenseur d'une "société du genre humain", d'un droit naturel opposés aux caprices despotiques, et donnant pour fin à l'Etat l'unité générale et le bonheur des individus, Fénelon ne pouvait qu'être salué par les Lumière comme un précurseur.

    Ce roman pédagogique prend place dans la grande lignée humaniste des œuvres consacrées, de Ronsard à Bossuet, au problème majeur d'une civilisation monarchique, qui est celui de l'éducation du prince. Humaniste, ce roman l'est par la fiction qui sert à traduire concrètement la pensée pédagogique de Fénelon par sa dimension utopique, par sa proposition d'une cité idéale, à la manière de Platon ou Thomas More.     


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    Alfred de Musset - On ne badine pas avec l'amour

    Ses études terminées, Perdican regagne le château paternel accompagné de son gouverneur, Maître Blazius. Au même moment arrive Camille, sa cousine, qui sort du couvent, avec Dame Pluche. Le Baron, père de Perdican, avait combiné cette arrivée simultanée. Camille refuse d'embrasser son cousin, ce qui stimule l'amour qu'il lui porte déjà. Déçu par la résistance de sa cousine, il fait la cour à Rosetta, la sœur de lait de Camille. Camille, quand à elle se flatte de laisser le jeune fiancé désespéré. Perdican l'intercepte et, blessé par tant de méchanceté, donne rendez-vous à sa cousine près d'une fontaine, où il fait une cour assidue à Rosette.

    Jalouse, Camille convoque Rosette dans sa chambre et lui fait assister, cachée derrière une tapisserie, à un entretien avec son cousin afin de lui prouver qu'il ne l'épousera pas. De fait, Perdican et Camille finissent par se déclarer leur amour...

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    On ne badine pas avec l'amour alternent des passages amusants à l'encontre des personnages secondaires grotesques et des passages pathétiques. Cette diversité des tons confère à la pièce son comique et sa sincérité.

    Les premiers rôles acquièrent au fur et à mesure de la pièce leur personnalité et leur unité : Camille devient coquette et cruelle ; Perdican, cynique et idéaliste, quitte son habit de séducteur pou parler de l'amour avec authenticité. Le chœur, expression de l'âme collective, se charge de rendre compte de l'évolution des personnages et de s'interroger avec le lecteur.

    A travers le discours de ses personnages, Musset attaque le clergé. Ainsi la variété dans la pièce, variété des sujets et des tons, engage l'art de Musset dans une voie originale, nouvelle pour les romantiques, celle du drame sincère qui s'épure de tout lyrisme.

    A l'origine, le proverbe était un divertissement, une improvisation pour illustrer un dicton. Au XIXe siècle, il devient le sous-titre d'une pièce où les personnages sont en général poussé jusqu’à la caricature. Musset a retenu quelques caractères du proverbe traditionnel ainsi que l'élégance du ton pour traiter de sujets moraux ou philosophiques. 

    Dans la pièce, il y a quinze décors différents. Tout ces endroits proches les uns des autres sont parties intégrantes d'un même lieu : le château où Camille et Perdican ont joué autrefois.

    La présence des personnages fantoches s'exprime par le désir de Musset de ménager des pauses dans l'atmosphère dramatique : le spectateur rit, se détend, renouvelle son intérêt pour l'action principale qui, pendant les scènes comiques n'a cessé de progresser.

        Après l'aventure de Venise, où lui et Sand avaient fait fi des convenances et de la société, il se rend compte que l'ennemi de l'amour n'est pas en dehors mais en lui-même : incompréhension née de l’orgueil et de l'égoïsme, mensonge et coquetterie, trahison.

     


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