• Né à Charleville le 20 octobre 1854, Arthur Rimbaud est élevé par une mère très autoritaire. Il suit de brillante études au collège de Charleville où il se distingue dans l’exercice de vers latin ; il lit Victor Hugo et les Parnassiens. Son professeur de rhétorique encourage ses essais poétiques. Le jeune Rimbaud, dès ses premiers poèmes, révèle une originalité incontestable et des intuitions étonnantes ; certaines de ses poésies sont déjà des chefs-d'oeuvre : Ma Bohème, Ophélie, Le Dormeur du val... Il use de son talent pour exprimer ses révoltes contre la société petite bourgeoise et ses premiers élans sensuels. A seize ans, il a déjà fait deux fugues. Les événements de 1870 et la Commune accentuent son gout pour la contestation et son désir de changer de vie. 

     

    Rimbaud se réjouit de la chute de l'Empire, soutient l'insurrection de la Commune et exprime sa révolte face à la répression. En 1871, il écrit Le Bateau ivre, long poème qui montre son ardent désir de trouver un nouveau chemin poétique. Dans Lettre d'un voyant, il affirme que "Je est un autre", c'est-à-dire que "Je" (le poète) doit se faire voyant par un dérèglement des sens qui le rend étranger à lui même. Rimbaud rêve d'aller à Paris et de s'introduire dans les milieux littéraires. Il envoie donc ses poèmes à Paul Verlaine qui, enthousiasmé, l'invite tout de suite à le rejoindre dans la capitale. Là, il surprend par sa vulgarité. Verlaine lui reste fidèle, et tous deux entreprennent une errance d'un an à travers l'Europe ; ils connaissent des moments de perversion, jusqu'au jour où Verlaine blesse Rimbaud d'un coup de revolver et échoue en prison. De ces années 1872 - 1873, datent les poèmes de Rimbaud les plus sensuels et les plus bouleversants. Ce "Satan enfant", comme l'appelle Verlaine, trouve une langue nouvelle par des superpositions de sensations et d'images, et crée le vers libre.

    Rimbaud revient auprès de sa mère pour écrire Une saison en enfer qui et une relation de ses folies. L'oeuvre exprime les remords du poète, son désir de dire adieu à la révolte, aux hallucinations et à la poésie et de revenir à une vie humble, proche des autres. Très vite après, il écrit Les illuminations qui sont des "instantanés" de poésie, décousus, faits de fantasmes, et rédigés sous l'effet de pulsions de l'être libéré. La quête poétique rimbaldienne s'achève là : après 1875, Rimbaud cesse d'écrire et repart seul pour un voyage à travers l'Europe ; il vit de petits métiers et revient auprès des siens de temps à autre. Puis, à partir de 1880, après un nouveau séjour à Chypre et à Aden, il rejoint le comptoir commercial de la compagnie Mazeran à Harar, au cœur de l'Abyssinie ; il va errer pendant dix ans entre les déserts et les oasis d'Ethiopie et d'Egypte, rêvant de fortune au fil de ses explorations et de ses trafics. Mais en 1891, il doit être rapatrié à Marseille pour être amputé d'une jambe à la suite d'une tumeur au genou. Il y meurt quelques mois plus tard, veillé par sa sœur Isabelle.     

    Rimbaud est animé par un profond désir de rompre avec "la vieillerie poétique". Le poète, selon lui, doit chercher du nouveau et arriver à l'inconnu, c'est-à-dire être voyant ; il juge catégoriquement ses prédécesseurs selon un seul critère : ont-ils été voyants ? Pour accéder à cet inconnu, il lâche la bride à tous ses sens et se laisse aller à l'hallucination. Ainsi,dans son esprit, il assiste à une métamorphose des éléments du monde ; les objets, les impressions, les rêves se mêlent et fusionnent dans une sorte de vertige. Rimbaud dit lui-même : "Je devins un opéra fabuleux." Pour transcrire ses hallucinations dans sa poésie, il se forge une langue poétique "résumant tout, parfums, sons, couleurs". Il passe du vers libre au poème en prose, où les effets de rythmes et de sonorités témoignent d'une extraordinaire magie verbale et d'une liberté enthousiaste. Rimbaud veut "acquérir des pouvoirs surnaturels", étreindre l'univers et, par la même, le recréer par la puissance poétique.  

    Le destin de Rimbaud, l'originalité de sa poésie, son brusque silence sont tellement étonnants qu'ils ont engendré un mythe : celui de l'adolescent révolté, d'une jeunesse exigeante et exaltée. Par ailleurs, la fulgurance de ses verts et la rapidité de sa rédaction l'on fait passer pour un génie qui aurait marqué l'avènement de la seule vraie poésie. De fait, il subit des influences comme celle de Baudelaire surtout, le renouvellement qu'il a apporté à la poésie est incontestable. Ce qu'il appelle "l'alchimie du verbe", c'est-à-dire cette fusion totale des sens qui fondent la parole poétique, va marquer à jamais la poésie postérieure ; Paul Claudel y voit une vraie révélation ; les surréalistes considéreront Rimbaud comme un précurseur.

     

     


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  • Hanshichi est un détective dans le Japon du XIXè siècle. Il reçoit régulièrement la visite d'un jeune journaliste auquel il raconte les enquêtes qui ont parsemé sa carrière, leurs mystères et comment ils les a résolues. Le garçon les cosignes avec soin et bâtit un vrai recueil d'investigations. Au fil des rencontre avec le Sherlock Holmes de l'époque, il entend et consigne des histoires impliquant des fantômes, des oiseaux géants, des loutres, des voleurs, des enfants, des samouraïs, des enlèvements ou des amants. Des histoires en lien avec les croyances de l'ancien temps et dans lesquelles il a fallu retrouver le chemin de la rationalité. Comment est-il possible qu'un kimono se balade tout seul dans la ville ? Qu'une jeune fille soit enlevée, ramenée chez elle puis enlevée de nouveau ? Qu'une cloche sonne alors qu'il n'y a plus le mécanisme pour la faire bouger ? D'empoisonner l'homme qu'on aime sans le savoir ? Ou qu'un humain se transforme en chat ?

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    Nous nous délectons avec cette suite d'enquêtes policières sans bavures, sans effusion de sang ni explosion. Le petit plus de ce livre est d'avoir été écrit par un vrai japonais à l'époque où le japon quittait ses kimonos pour le costumes trois pièces.

    Ces histoires ont été écrite par Kidô Okamoto au siècle passé. Fils d'un samouraï et auteur de théâtre, il a inventé le genre littéraire policier au Japon avec cette série. Son principe est excellent et même si les enquêtes n'ont pas de liens entre elles, il est difficile de ne pas en enchaîner la lecture.

    Ces nouvelles sont vraiment une mine d'information. On est plongé au cœur de la vie courante, et on y suit le rythme des nombreuses fêtes et célébrations. On y découvre beaucoup de métiers différents et on en apprend énormément sur les us et coutumes des japonais. Le dépaysement est total.  

     


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    Guillaume de Cernès, dit "Guillou", est un enfant attardé. Physiquement, il ressemble à son père, le baron Galéas de Cernès, un faible auquel incombe la tâche ingrate d'entretenir le cimetière, ce qu'il fait avec zèle. Paule a épousé le baron pour son titre et maintenant hait avec force son époux et son fils. Nous suivons le calvaire de cet enfant si disgracié physiquement, si sale, si arriéré que sa mère ne l'appelle que "le sagouin"

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    Mauriac aborde de nouveau le thème de l'enfance et de la mère en 1951 avec ce court roman qui connut immédiatement un grand succès. Il y met en scène une femme meurtrie par la vie, et aigrie, une marâtre qui refuse toute démonstration de tendresse et un petit garçon très sensible, mais à la limite de l'anormalité.

    Comme beaucoup de héros de François Mauriac, Guillaume et son père son des êtres mal aimés. En marge d'une société cruelle, face à une aristocratie décadente, ils subissent avec résignation leur non-accès à l'humanité. C'est le poids de la société qui accentue leur sentiment de solitude et d'incompréhension collective.

    Dieu ne se manifeste pas dans "Le Sagouin". A sa place règne une mère terrifiante et un père dégradé. Le fantasme familier de la mère cruelle s'incarne dans Paule de Cernès. Dans l'oeuvre tout entière de Mauriac, la mère est un personnage ambivalent : génétrix étouffante, elle est aussi une source de tendresse, un abri sûr devant les affres de la vie. Mais le personnage de Paule ne conserve que les traits négatifs. 

    Le génie littéraire de Mauriac, une fois de plus, réside en une extrême concision, une grande maîtrise dans le narration des passions qui l'empêche de tomber dans le pur naturalisme    

     

     


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